Un peu de craie et de bombe

Aaaah le printemps...! Y avait les piafs qui gazouillaient en se reluquant et les pies qui préparaient les nids avant de culbuter la mère, les bourgeons poppaient aux arbres et les cerisiers fleurissaient émergeant en boule de cotons roses. Et puis le retour du soleil aussi, pas posté là tous les jours mais assez souvent pour réchauffer les épidermes pâlottes des passants du dimanche. Dont celle de Joshua aujourd'hui. Il gardait son cuir comme une seconde peau mais n'avait enfilé qu'un tee shirt en dessous, se croyant déjà à la belle saison, et il avait pas complètement tord parce que ça lui suffisait bien pour pas choper la crève.

C'était un temps à l'oisiveté et le Sullivan comptait bien en profiter, il fallait bien se dérouiller le poignet suite à sa longue trêve hivernale. Si on pouvait parler de trêve, être en tête de la première manifestation anti-Incontestable faite depuis plus de deux siècles, c'était pas de tout repos. Nan, il vous parlait là d'une grève du stylet, du pinceau, du crayon de bois, de la bombe. Longtemps qu'il n'avait pas créé, heureusement c'était revenu avec les beaux jours. Mais ça avait été une sale période pour lui ces dernières semaines. L'angoisse de la page blanche, le fait de pas planter une image sur un support, cintiq ou béton, parce que rien ne venait. Son virus de l'hiver, la pire chose qui pouvait vous tomber dessus en tant qu'artiste, la panne. Le silence. Rien qui sort parce que rien à dire, rien qui vous percute, rien qui se transmet, du vide. Ces choses là, ça ne se force pas, faut laisser le temps pour que ça revienne. Il avait eu bien à faire avec les Incontrôlables, et ça lui servait gentiment d'excuse pour expliquer cette panne de l'imaginaire, il en était même venu à fuir sa table à dessin d’appréhension, acceptant la moindre proposition de sortie, d'activité, de taches ingrates à faire pour ne pas se retrouver le nez face à sa feuille. Pour vous dire, il en était même allé jusqu'à accepter un caprice de Nathaniel, féru d’énigmes qui lui avait matraqué la cervelle à coup d'intrigues plus farfelues les unes que les autres. Joshua se prêtait facilement aux jeux mais il était infoutu d'y trouver les réponses correctes, trop terre à terre et impatient pour cogiter plus de cinq minutes sur un problème. Ce qui avait le don d’énerver le rouge à force de se faire pilonner la gueule par son meilleur pote qui raflait systématiquement la mise.

Mais allez, c'était fini cette période là, car ce matin les idées lui avaient poussé dans la tête comme un bouquet de fleurs saturé en couleur et en odeur, généreux et dense. Ça lui démangea les phalanges à nouveau, heureux comme un gosse, deux secondes après, Joshua gribouillait déjà ces carnets d'esquisses, impatient à l'idée d'étaler à nouveau de la bombe sur un mur. Quelques gribouilles plus tard et indications que lui seul pouvait déchiffrer, il embarqua ses bombes, ses carnets, un futal, un tee shirt, ses docks, son blouson et sa tasse de kawa et ferma dans un bruit sourd la porte de son appartement.
Se brulant presque la langue, il vida son mug le temps d'un arrêt de métro et le rangea dans son sac pour sortir ensuite de la rame. Pas assuré, direction: tout droit. L'ours rouge se dirigeait vers un squat en annexe du centre ville où il savait la surface des murs changeante d'une semaine à l'autre, au nombre de graffeurs qui passait dans ces coins. Rien de mieux pour un derrouillage qu'une œuvre éphémère à flanquer sur un mur où tant d'autres y avaient déjà laissé trace, sueur, et énergie.
Mais son pas alors lourd et vif, ralentit lorsque ses yeux verts détectèrent de la craie colorée fixée sur un pan de mur. Un mini banc de jap' entourait l'esquisse, des paires d'yeux curieux et fascinés par ce qui se coloriait devant eux. Intrigué, le Sullivan s'approcha pour voir la gueule de l’œuvre, et s'arrêta à bonne hauteur pour pas gêner l'artiste en pleine action. C'était très différent de ses influences à lui, mais il aima sa gamme colorée, et savait faire la différence, quand il fallait reconnaitre le talent de l’esbroufe. Joshua brisa le cercle en se rapprochant du type, et causa:

- Chouette tes couleurs mec. Mais ça te dirai pas de jouer avec du medium plus pétant à l’œil? Il se baissa pour cueillir une craie jonchée dans sa boite à pigments et l'examina de plus près. Des craies d'écoliers, ça faisait une paye qu'il avait pas toucher à ce matériau là... Il s'amusa à faire rouler le bâtonnet vert dans le creux de sa paume, récupérant du bout de l'index la poudre. ... J'avais oublié comme ça s'effritait facile ces trucs là... Il releva la tête vers le gars qui semblait avoir été coiffé avec un balais à chiotte et ajouta: Ça tient quoi par beau temps tes dessins? Quatre jours si personne n'y touche?

Peut être que c'était son truc à lui aussi, l’œuvre éphémère. Joshua appliqua dans un coin vierge, hors de l’œuvre de l’étranger, un trait ou deux à la craie pour en jauger la tenue sur le mur, et nettoya du doigt aussitôt la trace. Son test confirma le peu de tenue de la craie sur la pierre, son expression toujours aussi perplexe collé sur le visage, il se tourna vers le type, attendant sa réponse.

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Dernière édition par Joshua Sullivan le Mar 31 Mar - 13:54, édité 1 fois
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victorledelfin
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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Jeu 19 Mar - 20:42 Répondre en citant
Sa barbe le grattait. Un de ces jours, il faudrait vraiment qu’il s’occupe de celle-ci, avec sa vieille barbe de six mois, il ressemblait à un clochard… Ah oui… Il en était un… Surtout que le printemps pointait le bon de son nez, plus besoin de la laisser pousser pour avoir un minimum de chaleur. Il détestait l’hiver, personne ne sort en hiver, tout le monde reste chez soi, près du feu (ou chauffage pour les moins riches) et qui dit personne dans les rues dit difficile de se procurer de l’argent… Heureusement que le printemps arrivait, le seul hic c’est qu’au printemps, les petites pluies sont assez fréquentes, impossible de rester sec une journée.. C’est vraiment chiant à la longue, mais le pire c’est l’été, les filles sortent une ombrelle à la main, ou elles ne sortent tout simplement pas… Elles ont trop peurs pour leur teint… Vraiment puéril… Et rebelote pour l’automne, le moment de l’année où les feuilles tombent et la pluie aussi par la même occasion. Bah, pour faire clair, Zero n’aimait aucune saison de l’année, y’a toujours un truc négatif sur celle-ci…

Aujourd’hui il était parti faire quelques dessins sur les murs des ruelles de Tokyo, de toute façon, il avait économisé pendant quelques semaines, il pourrait très bien poser une journée pour aller dessiner, son patron ne lui en voudrait pas… Heureusement d’ailleurs, ce serait étrange de se faire la gueule à soi-même, on le prendrait pour un fou, cas fréquent chez les clodos… Mais attention, il vie dans la rue depuis presque cinq ans et d’après ses calculs –sachant qu’il compte aussi bien qu’un enfant de huit ans- toutes les personnes qu’il connaissait et qu’il caractérisait comme peu fréquentable, ils tournaient tous dans les plu de dix ans à vivre sous les ponts, il avait encore de la marge…

Avec ses petites craies d’écolier, il commençait un dessin, faisant des formes, qui, au commencement, ne ressemblait à un gribouillage d’enfant de cinq ans. Ils tenaient toutes ses craies en même temps, pas très pratique surtout que quelques-unes se cassait en deux ou même en cinq. Il décida de poser ses craies tout en reculant pour voir ce que donnait son dessin. Il sourit, il commençait enfin à avoir de la gueule… Mais il arrêta sn admiration quand son dos heurta une masse non identifiable. Il se retourna, posant les yeux sur un homme, assez petit… A moins que ce ne soit lui qui est grand ? Il ne savait pas, tout lui paraissait petit de toute façon… Le gars fit une grimace, il avait peur ? C’est vrai que sa barbe le rendait suspect, mais à ce point ? Il lui sourit avant de s’excuser, autant ne pas chercher les emmerdes, surtout qu’au coin de la rue, il savait qu’à cette heure-ci, des policiers faisaient leurs rondes. Le visage du gars se décontracta, il l’avait mis en confiance. Il posa ses craies par terre, pas loin de lui pour pouvoir en chopper facilement.

Plus les minutes avançait, plus il entendait des gens derrière son dos, quelques fois il sentit une forte lumière l’aveugler, un flash… Il n’était qu’un petit dessinateur de rue, pourquoi prendre des photos de lui ? Surtout si c’est pour les garder pour soi et ne pas les diffuser sur internet… Il pourrait peut-être devenir célèbre ! Il rigolait tout seul de ses rêves… Les bridés devaient sans doute le prendre pour un fou, ou une personne narcissique à rire tout seul… Il s’en foutait, il n’en avait rien à faire de ce que pensent les Japonais, il les emmerde ceux-là. Le blond choppe une craie, une bleue, il la regarde attentivement, elle est entière, encore jamais utilisé… Il la remet finalement dans la boite, elle est ben trop précieuse pour l’utiliser maintenant, s’il devait l’utiliser, ce serait pour une occasion spéciale, quand il trouvera un travail par exemple, on peut toujours rêver non ? Si y’ pas d’espoir autant se suicider maintenant…

Une touffe rouge avec pleins de piercing arrive à sa droite. Un gars d’à peu près sa taille se pointe, il casse le cercle de bridé, au moins lui, il a les couilles de venir. Il mange pas les humains Zero, il a peut-être en ce moment une tête de yéti, mais ce n’est pas pour ça qu’il en est un… Il le félicite, il esquisse un sourire, sympa… Plus que cette bande de faux-cul qui vont partir sans laisser une petite pièce, d’ailleurs ils commencent déjà à partir au à la queuleuleu comme des petits moutons. Il regardait les craies, Zero priait pour qu’il ne prenne pas la bleue, il la gardait précieusement celle-là. Il lâcha un soupir de soulagement quand il vit la craie de couleur verte rouler entre ses mains. Le cercle de Japonais se vidait lentement, quelques-uns laissait une pièce ou deux, il sourit à ceux-là, au moins, eux, ils avaient compris que le spectacle était pas gratuit… Il reporta alors son attention vers le bleue, sa question le faisait bien rire :

« Ahah, j’me fais pas d’illusion je sais qu’il va même pas tenir deux jours, de toute façon, je sais pas pourquoi, mais à chaque fois mes dessins disparaissent… A mon avis, je suis stalké par les éboueurs… »

Il avait dit ça avec un ton assez blasé, c’était vrai, ses dessins ne restaient jamais longtemps en place, soit à cause du temps, soit les éboueurs où les gens qui n’avaient rien à faire nettoyaient ses œuvres. Peut-être qu’ils n’aimaient pas… Il leva un sourcil, attrapant une craie rouge assez petite, il ajoutait quelques touches de cette couleur par-ci par-là, mais finalement, il se ravisa, c’était pas très beau, ça gâchait le dessin. Il prit donc la manche de son blouson et frotta le mur comme un fou pendant quelques secondes pour effacer toutes traces de craie rouge, cette couleur était beaucoup trop vive pour sa fresque, il prit une jaune, ça ferait l’affaire… Il rigola avant d’ajouter :

« Ça reste peut-être pas longtemps, mais au moins, c’est facile à effacer si tu t’goures… »

Il faisait quelques détails, quand il arrêta, soulevant un sourcil :

« Pourquoi ces questions ? T’es de la police, c’est ça ? Tu vas me foutre une amande à cause de ça ? T’façon, on sait tous les deux que je la paierai jamais donc bon… »
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Joshua Sullivan

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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Ven 20 Mar - 12:33 Répondre en citant
Joshua s'était adossé contre le mur, le cul calé contre la pierre, dos vouté vers l'avant et la godasse ancrée à la verticale, son sac à ses pieds, la roulée déjà glissée entre ses doigts jaunies. A l'appel du mot "éboueur", l'image de Kato immergea sous ses yeux, avec son regard de bovin, sac poubelle sous le bras, des restes de cernes creusés sur la gueule plus flagrants qu'à l'accoutumé -la faute à sa frangine, Abbey- en train d'enfourner dans le ventre du cametar la merde des japs hebdomadaire. La vision du clodo filant comme une fusée en carton dans le container de sacs jaunes du père Iga sans que l'un ou l'autre ne le réalise lui traversa la caboche et le fit doucement sourire.

Il alluma son spliff inspirant un nuage de fumée qui lui chatouilla les bronches pour remonter vers sa glotte. Plaisir simple d'une dépendance légère, si ce n'est plus qu'il ne voulait bien se l'admettre, du pétard qui apaise joliment les maux et attise l'imaginaire. A voir le blondinet effacer de la manche sa trace, le colosse ne pu s’empêcher de penser que l'appli CTRL Z devrait exister dans n'importe quel domaine artistique et que son absence se faisait salement sentir quand lui même touchait à de la peinture. Aaaah, la magie de l'informatique. Et alors, l'artiste s'arrêta net, un regard à peine suspicieux porté sur le Sullivan:

« Pourquoi ces questions ? T’es de la police, c’est ça ? Tu vas me foutre une amande à cause de ça ? T’façon, on sait tous les deux que je la paierai jamais donc bon… »

Trois notes de son rire puissant dévalèrent de sa gueule, levant légèrement le poignet droit pour lui faire remarquer son pétard, Joshua lui répondit en arquant un sourcil un sourire vrai sur les lèvres:

- Tu trouves que j'ai la gueule d'un flicard? ...

Déjà capillairement il était pas dans la norme, et c'était sans parler de son look légèrement borderline autant par le nombre d'anneaux troués qu'il avait dans le corps que les tatouages et la matière de ses fringues. Pas très perspicace l'homme des rues. Pourtant Josh aurait parié qu'un zonard avait la meilleure planque au monde pour observer la masse et déceler d'innombrables détails des nombreux genres nippons. Pas pour tous apparemment.

- Et j'suis pas rac au point d'aller racketter du clodo t'inquiètes. Il tira sur son joint avant de poursuivre. J'm'interesse en simple confrère, je suis dessinateur aussi, Joshua Sullivan enchanté, il lui prit la main pour la lui serrer plus qu'il ne la tendit dans l'attente qu'il la prenne, ça t'dirai de gribouiller avec de la bombe aérosol? Se recalant contre son mur, il tapota le ventre de son sac avec sa semelle, j'ai la dose et l'humeur partageuse. L'ours zieuta rapidement les affaires au pieds du SDF avant de reprendre, j'imagine que tu vas vouloir te trimballer ton bordel, partout où qu't'ailles... Nan parce que j'te l'dis direct, dans les coins c'est mort, pour de la craie la flicaille va rien dire, mais pour de la bombe on aura pas l'temps de sortir trois traits qu'on va se faire courser direct. Surtout qu'en ton état de crève-misère tu dois les attirer comme mouche sur une merde.

Très délicat cette dernière métaphore Sullivan. Mais c'était sorti avec naturel et sans une once de méchanceté, la vérité crue sans fioriture, juste, comme à son habitude.

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victorledelfin
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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Mer 25 Mar - 16:18 Répondre en citant
La main dans les poches, il regardait le rouge perplexe, ce qu'il avait dit était vrai, comment lui, un homme sans rien pourrait payer une contravention ? Autant l'envoyer directement en taule, il perdrait moins de temps... Il n'avait pas remarqué jusqu'à maintenant, mais celui-ci avait un pétard dans les mains... S'il était vraiment flic, il devrait se reconvertir en acteur parce qu'on y verrait du feu... Prenant une bouffée du bâtonnet, il répondit. Le blond rigola, il n'avait peut-être pas une gueule de flic, mais il pourrait très bien être un espion ou un truc dans le genre... Il était parano ? Un peu, ouais... Surtout qu'il n'avait pas tellement l'habitude qu'on vienne tchatcher avec lui. Les gens n'osent pas trop l'approcher, normal, vous avez vu sa veste ? En ce temps, elle ressemble plus à un vieux torchon rempli de vomie qu'à autre chose... Il était vraiment dégueulasse quand il se regardait dans une des flaques d'eau pas loin de lui.

Prenant une bouffée du bâtonnet, il répondit. À ses risques et périls... En plus de ses petits poux qui commençaient à sautiller un peu partout sur sa tête, il avait les mains pourries. Ses ongles incrustés de terre et toutes les écorchures en voie de guérison en passant par le stade pue en disaient long. Il ne préféra pas serrer sa main, ses doigts étaient graisseux, des mains bien crades quoi... Il lui disait son nom, il devait lui aussi se présenter maintenant ? Ouhla ! Il avait presque oublié son nom le bougre... Ça faisait tellement longtemps qu'on ne le lui avait pas demandé, pour la première fois en un peu plus de six mois, il devait utiliser ses neurones, non, pas celle située dans le ventre... Celle du cerveau... Comment-on fait déjà ? Ah... Oui... Zero, il s'appelle Zero... Alors ses parents savaient d'avance qu'il serait un raté ? Sympa, la famille...

Il lui proposait de dessiner, une chose assez sympa... Il l'avait à moitié convaincu, c'est vrai, il n'avait pas l'air de porter de micro sur lui ou quoi que ce soit d'autre, surtout qu'il n'avait rien fait de particulier pour mériter d'être filé par un type, il était Japonais, il était dans son pays ici, même si certains aimeraient qu'il ne le soit pas... Son bordel ? Ahah et il n'avait rien vu... Ça ? C'était juste ce qu'il avait trouvé en arrivant ici, rien de bien particulier, à part peut-être ses craies auxquelles il y tient comme la prunelle de ses yeux... C'était juste quelques bouts de cartons et une ouverture... Les cartons, il pouvait les laisser là, les autres clodos du quartier se feraient une joie de les prendre et pour la couverture... Euh... Il va la garder celle-là, même si elle put le chien mort... Il prit son sac, une vieille sacoche US dans les tons bleus gris, était-il d'une autre couleur avant ? Il ne savait pas trop, quand il l'avait trouvé, il y a quelques semaines déjà, elle était déjà comme ça, un vieux bout de tissus délavé... Il jeta un dernier coup d'œil à ses affaires :

« Sympa mec... Ça m'touche autant de générosité... Zero... Zero Hinata. Tu peux m'app'ler Zero, on va pas faire d'chichi entre nous comme des lycéennes... 'Fin, pour les fringues, y'a rien d'intéressant, juste des babioles sans intérêt... Enfin, j'connais un bon endroit pour peindre sans qu'les flics viennent. Et crois pas, mais ça marche bien pour le camouflage ces vêt'ments, qu'est-ce tu crois, que je porte du vert kaki juste pour l'fun ? »

Enfin, non, il n'aimait pas tellement cette couleur, lui, il aimait plus les trucs flash, mais bon, on fait avec ce qu'on a sous la main... Il se baisse et fout la couverture dans la sacoche avant de la balancer sur l'épaule, il se relève et se tourne vers Joshua et lui demande :

« T'connais l'usine désaffectée pas loin du port ? La plupart du temps y'a aucun flic là-bas... A moins qu't'es une autre idée... »

HRP:


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Katô Iga


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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Dim 29 Mar - 21:52 Répondre en citant


« Bon, les gars, j’ai b’soin d’un volontaire : y’a encore eu du squat du côté de l’usine désaffectée, ‘faut encore aller nettoyer derrière… »

On s’ébroue dans la salle de pause. Ils ne sont pas beaucoup à être encore présents. Personnellement, tu repoussais ton retour à l’appartement en lézardant, le front contre la vitre, comme si tu absorbais goulument la lumière matinale, comme la plante verte que tu étais. Parce que le week-end était synonyme, non seulement de squat dans cette usine désaffectée, mais également chez toi, lorsque toute la petite bande des Incontrôlables s’y entassait pour siroter un verre autour d’Abbey.

Tes collègues n’ont pas eu le temps de s’embourber dans leur flemme et leur gêne que tu te décolles de la fenêtre, le visage brûlant et la mèche éparse, comme au réveil. Le signal est donné, le volontaire est déniché, tout le monde se remet à respirer ou à barboter dans son café.
Pourtant, Dieu seul sait que t’aimais pas trop nettoyer les graffitis. Parce qu’y’en avait devant lesquels tu pouvais rester des heures, immobile, le karcher encore dans le véhicule. Pas forcément parce que tu les trouvais à ton goût –si seulement tu pouvais faire preuve de la notion de goût-, mais parce que tu te laissais aller à imaginer l’histoire qui ronflait derrière ces tags encore frais.

Il ne fallait pas se faire d’illusions ; il s’agissait souvent de messages haineux vis-à-vis du gouvernement. Mais, à plusieurs reprises, tu avais cru avoir affaire à un artiste tout simplement lassé de gribouiller sur une feuille de 30 cm, et qui voulait se mesurer à plus grand que lui. Et c’était alors tout à son honneur.
En fait, pour toi, aller nettoyer les graffitis ressemblait davantage à une promenade de santé, dans une atmosphère lourde de hangars désaffectés et de peinture toxique.

Une fois sur place, tu sors tout ton fourbis de matériel, un à un, le dos chauffant malgré le vent encore frais. Tu semblais bouger au ralenti, enfin, encore plus que d’habitude. Ton regard s’éparpille, roule et se perd sur la façade de l’usine. Vous la nettoyiez régulièrement, même si la police ne faisait pas souvent de ronde par ici ; conscience professionnelle, sans doute… Heures sup’ plutôt, quand on savait qu’elles ne vous étaient pas facturées… Service rendu à la ville, vous devriez être fiers…
Tu fais une fois le tour de l’aile droite du bâtiment, à la recherche des nouveaux nés. Mouais, pas terribles ceux-là, on sentait que leurs artistes avaient un coup dans le nez et dans les yeux lorsqu’ils avaient barbouillé ça sur le mur. Ça n’allait pas forcément être ennuyeux à nettoyer. Avec un peu de chance, tu aurais le temps de retourner voir ceux que tu avais laissé à l’intérieur, le mois dernier ; il y avait une partie en anglais que tu n’avais toujours pas réussi à déchiffrer.

Puis soudain, grésillant comme un insecte, des voix qui se cognent aux vieilles tôles. Tu dresses l’oreille, aux aguets, un peu malgré toi, de vieux réflexes, plus si vieux que ça après les dernières manifs, dont tu gardes encore une trace rougeoyante étouffée sous un pansement sur ton oreille gauche.
Tu traînes karcher et produits nettoyants avec toi jusqu’aux nouveaux venus. Tu t’attendais à une bande de jeunes venus zoner pour s’en griller une.
Mais le vent t’amène une odeur tout autre que celle de cannabis mal coupé. Du cuir, à n’en pas douter, et un autre parfum douteux…
Tu restes planté là, les bras ballants. On dirait presque que ça t’ennuie… de tomber sur ton nouveau beau-frère, la tignasse encore rubiconde, flanqué de ce qui ressemble, ce qui sent, de près ou de loin, à un sans-abri…
Tu les vois venir, à voir comme ils sont armés de couleurs… quitte à passer pour le trouble-paix de service.
« Z’avez pas le droit d’être ici, les gars. » Un regard qui se voulait insistant sur les bombes de peinture. Et à l’attention de Joss plus particulièrement. T’avais rien contre Joss ; il avait fini par plus ou moins te tolérer à plus de quelques mètres de sa sœur ; mais c’était comme si tu étais à chaque fois pris de cette irrépressible envie de tout simplement le faire chier… Lui qui te prenait pour un légume de la saison dernière. Et ce, même s’il faisait deux fois ta taille. « C’est de la dégradation de bien public… » Ouais, on dirait presque que, du fond de ta pupille grise, tu veux lui faire comprendre quelque chose comme « j’vais l’dire à ta sœur, si tu m’écoutes pas… »


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Dernière édition par Katô Iga le Sam 11 Avr - 19:11, édité 2 fois
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Joshua Sullivan

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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Mar 31 Mar - 13:41 Répondre en citant
Et allez hop, sac sur le dos, casseroles qui trainaillent à l'arrière du convoi, le Zéro en duo de couleurs, ils se sont mis d'accord en trois coups de phrasées et se rendent direct sur le lieu du crime.
Il sentait quand même fort son collègue du jour, rien d'étonnant à ça, mais assez pour que Josh se sente être l'endimanché de service se rendant à la messe. Durant le trajet les menant à l'usine, l'ours rouge se montra aussi curieux qu'à son habitude, d'abord sur son art, du genre: tu dessines sur du mur principalement ou tu grattes aussi du papier? Ou encore le: ça fait longtemps que tu t'es mis à la craie? Pour enfin bifurquer naturellement sur du: tu t'es retrouvé à la rue comment? Mais cette dernière question ne trouva qu'un début de réponse, car le temps de bavasser, ils étaient rendus dans la zone, et il n'était plus question de piailler mais de s'organiser.

- Alors... Vu que tous les murs sont déjà remplis, j'te propose de partir de la croute la plus moche du secteur, qu'a l’éclairage qui va bien et la surface la moins dégueulasse à taguer, et ensuite on bombe. Ca t'va?

Il avait son feu vert, et déjà, ils se séparaient pour repérer le mur de leur futur fresque. A regarder les graffitis, Joshua repéra plusieurs signatures qui lui étaient pas étrangères, il esquissa un sourire pour les plus ratés du lot, il s'imaginait la réaction de l'artiste, un confrère au sang chaud, et pensa que recouvrir sa surface de sa patte serait presque lui rendre service vu la gueule du machin. Mais il se garda bien de le faire, laissant l'emplacement à un autre. Fasciné par les couleurs, Joshua s'était perdu dans les tracés de bombes, relevant les associations pas banales pour les foutre dans sa boite à idées. De temps en temps, il croisait un gusse, parfois même Zéro, dans l'ouverture d'une porte. Et puis, au fur et à mesure de l'ascension, le Sullivan se perdait un peu plus dans la contemplation des talents réunis ici, recueillant les infos picturales qui accrochaient son regard au point d'en oublier le but premier de cette visite de galeries à ciel ouvert. C'est la voix du clodo qui le réveilla de sa transe.

- Je viens!

Avait-il gueulé pour toute réponse. Ses docks frappaient lourdement sur le sol poussiéreux recouvert d"éclats de verres et en quelques enjambés, il avait remis la main sur son partenaire. Au son de sa voix et à l'odeur, Joshua le retrouva sans mal. Zéro avait trouvé le mur. Alors, un franc sourire aux lèvres, la patte de Josh tomba sur son épaule et il dit, parcourant l'espace des yeux:

- Bonne pioche! Il me plait bien. D'autant que la peinture est vieille, il est plus que temps d'lui faire peau neuve.

Joshua sortit alors l'attirail de son sac, il tendit un masque à Zéro, s'accroupit, et posa les bombes au sol les rangeant par ordre chromatique devant eux à un mètre de la toile. Ses doigts tremblèrent d'impatience, ça le démangeait sévère, ce sourire collé à son visage de grand môme, pas prêt à se déloger de sitôt.

- Tu tapes dans les couleurs qui t'plaise, juste ce brun là, tu me le touches pas, j'vais en avoir besoin pour mon fond.

Le clodo prit bonne note, il était cool. Il lui semblait même réglo. Suite à ça, Joshua s'apprêta à lui filer deux trois conseils vu qu'il semblait débuter en la matière, mais c'était sans compter sur la présence de l'autre gusse. Au bruit de sacs en plastique et des roulettes sur le béton, Josh s'était pas méfié. Surement un junky qui cherche un coin tranquille où préparer sa petite dinette s'était-il dit. Mais nan. C'était le Cachalot avec son attirail de Monsieur Propre et sa tenue de combat. Joshua, carrément surpris par cette vision d'horreur incompréhensible, grimaça d'étonnement et lâcha un:

- Katô? ... Mais qu'est c'que tu fous là? T'es pas censé récurer une benne dans la 42eme rue?

Comme à son habitude, le lama des plages ne broncha pas. Pire, il releva même pas la vanne, se contentant de répliquer d'une voix morne:

- Z’avez pas le droit d’être ici, les gars. C’est de la dégradation de bien public…

Il matait le matos avec insistance, s'il était capable d'expressions, surement qu'il aurait affiché une mine réprobatrice du flic de service. Et sa dernière réplique confirma cette impression:

« j’vais l’dire à ta sœur, si tu m’écoutes pas… »

Il savait pas ce qui lui fit le plus rire, son gilet fluo assorti au karcher qui lui sied si bien ou la menace sous-jacente de ses propos. En tout les cas il était nerveux, ce rire. Et Joshua fit mine de ne pas le prendre au sérieux.

- Allez beau frère, arrêtes tes cracks cinq minutes et viens te joindre à nous...

Josh avait fait les quelques pas le séparant du père Iga et son bras s'enroulait déjà autour de ses épaules lorsqu'il lui avait jeté cette phrase. Il était pas en position de lui grogner proprement dessus. Pas cette fois. L'envie de peinturluré ce mur était bien plus forte que celle de casser la gueule du Cachalot, d'autant qu'il avait beau dire, il redoutait la réaction de sa frangine.

- ...On est pas parti sur le bon pied tous les deux, ça t'dis qu'on r'prenne du début? Joshua hocha la tête vers Zéro, mon pote va t'montrer le but du jeu, tu vas voir, tu vas forcement y prendre gout.

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Merci Kato Iga pour ce génialissime dessin. Tu sais que je t'aime beau frère?

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victorledelfin
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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Dim 5 Avr - 17:27 Répondre en citant
Le blond et le rouge se dirigeaient vers l'usine désaffectée, tranquillement, le blond découvrit une facette du rouge, il était vraiment curieux le bougre. Posant toutes les questions possibles et inimaginables, Zero ne savait plus où en donner de la tête répondant une à une à ses questions, il aimait bien le faire, les gens ne s'intéressaient guère à sa vie alors quand on lui posait ce genre de question, il répondait avec un petit sourire, au moins, il n'y avait pas de blanc dans leur conversation. Trois ans qu'il dessinait à la craie sur le sol, la seule chose qu'il sait réellement faire de ses mains... La discussion vrille vers des questions plus ou moins personnelles, et celle que tout le monde attend arrive. Une phrase toute simple. Comment t'en est arrivé là ? Une question un peu plus délicate que les autres, autant les autres étaient futiles, autant, celle-ci était moins sympathique à répondre... Il fit une petite grimace, fronçant les sourcils :

« J'étais un vrai branleur, j'me suis fait exclure de chez-moi. »

Net, il ne voulait pas trop s'étendre là-dessus, surtout quand la personne en face de lui était un pur inconnu avec qui il avait sympathisé rencontré cinq minutes plus tôt. Il regardait le ciel, celui-ci commençait tout doucement à se baisser dans le ciel, qu'il faisait beau aujourd'hui ! Pour une fois que le ciel n'était pas caché par tous ces nuages gris. Sur leur chemin vers l'usine, ils croisèrent une mère tenant par la main son fils, il regardait le ciel, les yeux grands ouverts, il s'exclama en pointant du doigt le ciel :

« Whaou ! Alors c'est a ça que ressemble le ciel ? C'beauuuuuuuuuuu... »

Le blond rigolait, l'innocence de cet enfant le faisait bien marrer. L'enfant ne connaissait encore rien de la vie, se disant encore que papa Noël et la petite souris existent. Il sera bien déçu en apprenant la vérité, celle où, les parents glissent une petite pièce d'un euro sous votre oreiller ou quand il dépose au pied du sapin les quelques cadeaux. Tellement innocent... Peut-être trop même... Il détourne son attention, la reportant sur le rouge, ils sont arrivés.Il lui proposait un truc, une bonne idée, il accepta et commença à s'atteler à sa tâche. Il avançait dans l'usine, faisant glisser sa main sur le mur à la recherche d'un graffiti datant de l'année dernière. Il croisa un de ses compères sur son chemin, celui-ci, casserole dans une main, flageolet en conserve dans l'autre, le regardait, d'un air méfiant :

« T'inquiète mec, j'vais rien t'voler, je cherche juste un mur pour le gratter un peu... »

Pour toute réponse, le clochard se leva et, d'un pas souple, alla jusqu' 'à une autre pièce en faisant un petit signe. Zero le suivait, il avait confiance en lui, comme tout clochard qui se respecte, pas la moindre seconde, il ne se disait que ce gars aurait pu être un meurtrier, non, c'était une confiance mutuelle et c'est celle-ci qui avait fait se lever le vieux pour lui proposer un mur, tout ce qu'il y a de plus vieux, et de toute façon, si celui-ci essayait de l'attaquer, rien de bon n'arriverait pour lui... Zero appelle Joshua de sa grosse voix d'ours, celui-ci arrive en quelques secondes, sacré rapidité, en même temps, avec les jambes qu'il a... Il fait un signe de la tête en direction du vieux pour le remercier, il ne lui avait rien dit, mais celui-ci avait directement capté ce qu'il cherchait, il pourrait faire un bon marchand, le bougre, le temps qu'il se retourne pour regarder le rouge, la vieille chevelure du vieux avait disparu. Le clochard regardait un peu partout autour de lui levant un sourcil, il était passé où ? Sans dire au revoir ? Étrange... Le rouge dit quelque chose, ce qui attira l'attention du blond vers lui :

« C'est pas moi qui l'ai trouvé, m'bon... »

Il s'accroupit à ses côtés, alors qu'il montrait son trésor, des bombes. Le sans-abri les regardait avec des étoiles dans les yeux, c'est choses serait beaucoup mieux que ses petites craies achetées au super marché pour trois sous. Il pouvait prendre la couleur qu'il voulait ? Bien, bien... Encore mieux qu'il ne le pensait ! Il fouillait un peu, écoutant les directives du rouge, pas cette bombe ? Pas de problème, aujourd'hui, il allait faire le dessin le plus coloré qu'il n'avait jamais fait ! Des bruits de pas attirèrent son attention alors qu'il regardait fixement le mur, à la recherche d'inspiration, mais ces bruits, il ne pensait pas que c'était le vieux clodo de tout à l'heure, il se releva regardant qui arrivait. Eh merde... C survêt' dégueulasse, ses pompes et surtout le karcher, un d'ces putains d'éboueur... Ils étaient tombés sur le gros lot... Zero posa sa main sur le rouge pour le prévenir de la présence du trouble-fait. Celui-ci se retourna, surpris, il le connaissait ? Ce petit brun sans aucune expression sur le visage, un rabat-joie. Le blond cendré regardait la scène qui se déroulait devant ses yeux, un petit sourire en coin, un drôle de contraste ces deux gars... L'un vraiment grand, les cheveux rouges, truffés de piercings, un sourire enfantin collé au visage, tandis que l'autre le regardait de ses yeux mornes, un type vraiment petit à côté de Joshua, brun, tout ce qu'il y a de moins remarquable... Et voilà, la phrase à laquelle il s'attendait, il n'était même pas surpris. Sa sœur ? Euh... Du chantage ?

Comme chantage, y'a mieux, c'est pas comme si la sœur allait changer grand-chose à la situation, au pire, le rouge se ferait réprimander, mais rien de bien grave, enfin, c'est ce que pensait Zero. Mais quel lien y avait-il entre eux ? Le blond se le demandait... Faire une p'tite démo ? Ohlala... Mais il ne savait pas peindre à la bombe, lui. Il regarda quelques secondes les deux énergumènes, déjà, il fallait trouver un truc à faire, un concept. Il trouva ! Il s'accroupit vers les bombes, sortant une bombe de couleur marron du sac, un marron assez clair virant plus dans les verts, cette couleur était parfaite pour ce qu'il voulait faire ! Il resta quelque temps à croupi, regardant comment réagissait la bombe lorsqu'on l'approchait trop du sol, plus elle s'approche, plus le trait est fin... Il avait à peu près capté comment ça se gérer... Il se releva alors, la bombe à la main, et sortait une craie de sa poche, la fameuse craie entière, bah oui, fallait fêter ça ! Il dessina rapidement un croquis du dessin. Lui, il pouvait le comprendre son croquis, ou plutôt l'ébauche, ça ne ressemblait pas à grand-chose pour une personne extérieur, mais pour lui qui savait exactement ce qu'il allait faire, c'était essentiel. Sa craie avait perdu un bon centimètre, il souffla sur celle-ci avant de la ranger dans sa poche content de lui, la première phase était finie et elle n'avait pas duré longtemps.

« Bon, c'la première fois que j'fais ça... »

Il empoigna la bombe avec ses grosses paluches noircies par la terre et enleva le bouchon pour commencer à peinturlurer le mur. Le dessin prenait rapidement forme, et même si à quelques endroits les traits étaient plus gros que les autres ou qu'encore, il dépassait, ça ne rendait que le résultat encore plus drôle qu'il ne devait l'être. Il empoigna du rouge, commença à faire des traits allant dans tous les sens, du brun, tout droit, carré, uniforme. Deux silhouettes commencèrent à se dessiner sur le mur, une géante tenant dans ses bras un petit bébé, ou plutôt une personne de petite taille. Sans se retourner, le blond lâcha un petit commentaire :

« M'en voudrez pas, je vous prends en modèle... »

Le géant tenait le gosse, une expression terrifiante sur le visage, allait-il le manger ? Ça en avait tout l'air... Et le gosse, les cheveux bien coiffés, dans ses vêtements jaunes fluos, une expression neutre collée au visage, il n'avait pas l'air d'avoir peur, une vraie caricature de ces deux spécimens... Les traits uniformes rendaient le rendu encore mieux qu'il ne le pensait, c'était vraiment bien, même si le dessin n'était pas encore fini, le blond était assez satisfait de son travail, même s'il fallait retoucher quelques endroits, mais il demanderait quelques conseils à Joshua, c'était lui l'expert... Il se retourna :

« Bon... Vous vous connaissez d'où ? »
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Katô Iga


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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Mar 21 Avr - 16:18 Répondre en citant

Menace un peu vaine donc, de toute façon, ça n’était pas demain la veille que tu allais arracher une once de frayeur à ce grand gaillard-là. Tu tiques néanmoins lorsqu’il t’appelle Katô –parce que chez vous les Japs, rappelons-le, l’appellation par le prénom était réservée aux gens très proches, et, s’il y avait bien un incontrôlable que tu adorais tourner en ridicule, et vice-versa, c’était bien lui.
Pire encore, voilà que le géant rouge anciennement vert allonge trois pas dans ta direction et manquerait de te briser la nuque en passant un bras autour de tes épaules. Il te traîne jusqu’à leur bac à sable plein de couleurs, et tu dois tordre ton poignet dans tous les sens pour que tout ton attirail ne renverse pas une seule bombe, alignées comme des miliciens qu’elles étaient –vous voyez que tu faisais des efforts ! Tu bronches pas –quand bien même t’as toujours l’air de broncher alors on ne voit plus la différence- mais te dégages toutefois subtilement en glissant la pointe du karcher entre toi et son énorme bras. Mieux valait ne pas te pousser dans tes retranchements, au risque qu’il s’énerve à son tour. Et au vu de comment il serait capable de te mettre à terre d’un éternuement malgré ta carrure de boxeur court sur pattes, tu préfères la jouer bovidé avec lui, histoire qu’il ait trop pitié pour lever la main sur toi.

Tu les regardes s’agiter, immobile, tandis que le clochard était censé te faire une petite démo de la bêtise Sullivan du jour. Le sourcil arqué, appuyant un coude sur ton karcher au repos, tu ne clignerais presque pas des yeux. On te prendrait pour un mime que Joshua se faisait un plaisir de narguer, tandis que l’étrange type aux cheveux décolorés s’afférait autour du mur. T’as un regard un peu dans le vague vers la nouvelle main de ton beau-frère. Bah, c’était pas ça qui allait t’empêcher de lui mener la vie dure.
« Si tu essayes de m’amadouer, juste le temps de faire ton gribouillage… » Ouh, c’était vilain ça, d’autant plus que tu avais déjà eu l’occasion de voir un peu son travail et que, si t’avais pas été tout seul à ce moment-là, tu serais bien resté une heure entière à le contempler, l’œil hagard, se perdant non sans satisfaction dans les tourbillons intelligents de couleurs. « Bah c’est râpé… » que tu conclus, sans détacher ton œil bovin de l’étrange croquis qui coulait sous vos yeux ébahis.
« J’veux dire » Oui, tu essayes de faire la conversation, histoire que ça le fasse bien rire « les autres éboueurs ont pas autant de sensibilité artistique que moi » que tu lui sors, comme une fleur, levant les yeux vers lui, exagérément, le seul moyen que tu avais trouvé pour le regarder en face sans avoir à te dresser ridiculement sur la pointe des pieds.

L’air se charge de l’odeur un peu toxique des bombes, d’autant plus que c’est apparemment la première fois que monsieur le clochard s’essaye au graffiti.
Et le bougre avait tenu à immortaliser ça rien que pour vous deux.
C’est pourquoi vous vous êtes retrouvés tous les deux à vous contempler épinglés au mur, version XXL pour Josh et XXS pour toi (ou grandeur nature, selon les points de vue).
T’as déjà l’air circonspect h24 de nature, alors allez savoir comment, tu lances au sans-abri un regard encore plus perplexe que d’habitude. Si Joshua l’ouvre pour se marrer d’un rien, toi, ça relève des 12 travaux d’Hercule pour t’arracher un ricanement. A moins de s’appeler Tara.
« Joss, ce type vient de révéler au monde entier ton attrait pour les petits enfants, apparemment… » Non, on va dire que tu ne t’es pas reconnu, alors que la crinière rouge ne trompait pas. « T’es certain que tu veux pas que j’nettoie ? » que tu demandes, feignant allumer ton arme de nettoyage massif, pointée tout à fait fortuitement vers leurs deux trognes. « J’dis ça, j’dis rien, hein… » Et pour les formalités, tu laisseras Josh s’en occuper, ‘fallait pas exagérer non plus.


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Joshua Sullivan

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MessageSujet: Re: Un peu de craie et de bombe Mar 21 Avr - 22:31 Répondre en citant

Spoiler:



Tandis que le clodo leur bombait le portrait à la façon d'un caricaturiste des temps modernes, Joshua s’égosillait sans dissimulation aucune sur ses impressions du moment. Sa première réaction eut été de vouloir frapper dans ses mains pour féliciter le bougre venant à peine de finir l'ébauche, mais l'homme de fer se ravisa vite lorsqu'il claqua sa paume de métal dans celle d’épiderme se fouettant magistralement, tout seul comme un grand. Il se mordit la joue pour ne pas gémir de douleur et ravala un instant ses railleries avant de reprendre de plus belle. Ça allait du pouffement grotesque aux dégueulis d'onomatopées rauques, modelant sur sa trogne une poignée d'expressions variées, de la moquerie à la satisfaction, suintant de temps en temps quelques paroles du genre:

- Bah raaaaalleeez Katô, tu la portes bien la tétine!
Ou encore:
- Même en mini monstre, t'as toujours l'air à la masse... Dingue! Ta mère d'vait avoir un mal de chien à savoir c'que tu préférais entre le camion jaune et le DVD de Bob l'Eponge...

Il ria moins quand se dessina l'expression d'ogre sur son portrait. Comme s'il voulait le bouffer le Kato... Morfm. Non c'est faux, c'est pas moi, j'ai un alibi, j'étais au cinéma.
... Nan mais vraiment, c'était flagrant à ce point?

Kato, pas idiot non plus, ne perdait pas le nord, rappelant entre deux vannes qu'il assumerait son rôle d'emmerdeur de première jusqu'au bout et qu'il n'était pas complètement dupe. Et il avait cette manière de le lui dire qui pouvait passer comme de la provocation, pire, une insulte. A croire que ce mec était né pour le foutre en rogne. Le Sullivan serra la mâchoire, se retint de bondir de suite, et pour cause, il n'avait pas fini sa phrase. A la suite de quoi Josh se contenta d'hausser un sourcil et de lui répondre le plus spontanément du monde:

- Parce que t'as d'la sensibilité artistique toi? ... Remarque, vu le temps que tu passes à regarder les mouches... T'as l'air toujours barré ailleurs, faut bien que ton esprit divague quelque part...

Ça ressemblait presque à un compliment. Sur le coup ça lui sembla couler sous le sens si bien qu'il n'ajouta rien. Parce que pour une fois, l'info ne lui donnait pas matière à la pique mais plutôt à de la curiosité. Iga et lui n'avait jusqu'alors rien en commun, à part Abbey et peut être la couleur de leurs sacs poubelles. Mais y avait comme l’ébauche d'un point commun au travers les brèves paroles de Kato. Si y avait bien un truc que Joshua avait cerné du personnage, c'était qu'il était du genre économe en mots, et qu'en ce sens, il déblatérait pas du mensonge. Mais la pensée à peine pointée du doigt ravisa illico le rouge à l'idée de pousser plus loin sa réflexion. Il en était rendu là dans sa caboche lorsque Zero eut terminé sa fresque:

« Bon... Vous vous connaissez d'où ? »
« Joss, ce type vient de révéler au monde entier ton attrait pour les petits enfants, apparemment… »

Joshua pivota la tête lentement vers l'éboueur.
...Il avait dit quoi là?

« T’es certain que tu veux pas que j’nettoie ? J’dis ça, j’dis rien, hein… »

Les mouches. Y avait pas à chercher plus loin, ce mec devait juste contempler les mouches. Rien de plus. Sensibilité artistique SON CUL OUAIS! Il était même pas foutu de retenir correctement SON PRENOM!! (Comme si ça avait la moindre chose à voir) Et puis c'était pas comme si y avait QU'UNE VOYELLE à retenir, le genre qui se retenait bien en plus comme son, mémo facile: il avait la même dans le sien, et puis merde à peu de choses près il avait cru entendre le prénom d 'une autre et la blague lui plu pas, mais alors, vraiment pas. Il se retint d'exploser verbalement bouffant les mots qui fâchaient aux commissures des lèvres pour n'en sortir que les paroles édulcorées:

- JOSHUA! Je m'appelle JOSHUA, T'imprimes ou faut que j'te l'fax?!...

Il releva même pas le déni flagrant du poisson rouge face à sa caricature et se contenta d'ignorer proprement Katô, répondant alors à Zero:

- ... Ce truc est mon beau frère. Levant de sa main bionique le V de la victoire il ajouta. Merci le Con Détestable...! Pointant le menton vers Zero il demanda: Et toi, maqué?

Puis saisit une bombe et commença à barbouiller son bout de mur.

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Merci Kato Iga pour ce génialissime dessin. Tu sais que je t'aime beau frère?